Mes
amis,
J´aimerais bien critiquer, diffuser cet événement si violent
qui est arrivé à Rio. Il ne faut pas l´accepter. Il faut
chercher des alliés dans cette lutte.
Les indiens de l´ALDEIA MARACANÃ ont été expulsés
par les forces de la mairie et de l´Etat de Rio, ce vendredi, à
3 heures de matin. Il s´agit d´une autre action de "nettoyage
" de la ville de Rio par la mairie, pour la coupe du monde. Cris, désespoir,
abandon, solitude, se mélangeaient dans une ambiance violente où
n´ont pas manqué les gaz lacrymogènes, et dautres
sprays agressifs aux piments, ...
L´Aldeia Maracanã, ainsi s´appelle cet espace occupé
par les indiens depuis longtemps... C´est toute une histoire qui mérite
dêtre racontée. C´était un "lieu"
indien, un territoire démocratique où tout le monde était
bienvenu. C´était un lieu par excellence de lexercice de
la politique, une politique-éthique-esthétique du soin
qui affrontait les inégalités étatiques. Motifs
et rêves variés nexcluaient pas lexpérience
potentielle de la vie commune, la lutte pour renforcer la présence
des indiens dans le territoire brésilien. C´était un espace
de résistance indienne qui comporte un devenir minoritaire.
Quelques indiens avaient leurs maisons dans cet espace. Plusieurs pratiquaient
leurs cultures.
L´Aldeia Maracanã était aussi un lieu de recherche où
plusieurs étudiants identifiés avec la cause indigène
s´enrichissaient avec sa culture. Plusieurs indiens pratiquaient aussi
le nomadisme, que l´État naime pas, mais qui est si caractéristique
du peuple indien du Brésil. Ce lieu favorisait leurs déplacements
aussi bien à Rio que dans bien d´autres régions du Brésil.
Cet espace, situé à côté du grand stade de football
Maracanã, comprend un grand terrain avec une construction ancienne,
une beauté architecturale, qui insiste à rester mettre debout
malgré l´indifférence de l´Etat devant les dégâts
causés par le temps allié à la précarité
de la vie sociale. Les indiens disaient quils n´avaient
aucun moyen de l´entretenir.
La grande majorité des indiens brésiliens sont pauvres,
ils vivent une incompatibilité entre leurs façons de vivre,
leurs cultures et la culture ethnocentrique du blanc colonisateur. Ils réussissent
à survivre dans cette société inégale, capitaliste
où ce qui vaut est le profit. C´est triste de voir les indiens
brésiliens yanomanis, avec leurs cultures colorées, peints en
noir, les yeux tristes, de voir leurs danses sans la vitalité, sans
l´enthousiasme qui leur étaient caractéristiques.
Les indiens de l´Aldeia Maracanã ne faisaient pas exception à
cette règle.
Ils avaient des problèmes d´eau, d´électricité.
La pluie forte inondait la beauté architecturale, une grande maison
qui était inhabitable. Les fenêtres n´avaient plus de vitres,
le toit était plein de trous ...
Enfin, nous avons un exemple emblématique de l´indifférence
étatique devant les besoins des mouvements sociaux. Mais la nature,
si chère aux indiens, la mère terre, leur bien Aimée,
a été prodigieuse faisant avec eux une forte alliance, avec
la présence de beaux arbres, des plantes, d´une fraîcheur
qui contrastait avec l´ambiance polluée causée par le
trafic routier, intense dans la région. Sur ce terrain, ils construisaient
leurs petites maisons, très simples, précaires.
L´indifférence étatique aussi présente dans le
tissu social vient d´affirmer sa force de nouveau. La proximité
de la coupe du monde, la proximité de cet espace du grand stade de
football, lintérêt de faire un maquillage à Rio,
fait que le gouvernement continue son plan de nettoyage de la ville, expulsant
les résidus du capital des zones où il pense qu´ils seront
exclus de la vie d´une ville planifiée par l´État.
La force étatique capitaliste veut construire un musée du football,
un modèle anthropo-physique de la mémoire. Elle ignore la force
vive de l´histoire, qui construit une mémoire pour le combat.
Une grande partie des indigènes ont été déplacés
sur un terrain dans la banlieue de la ville de Rio, à côté de
l´Institut de l´État de Dermatologie Sanitaire de Rio de
Janeiro, également un espace public de ségrégation,
pour les porteurs de la maladie de Hansen, mais qui actuellement a un profil qui
devient, à partir de la lutte de ses habitants, un quartier qui essaye
de sintégrer davantage à la ville et mène une politique
locale damélioration de la santé.
Aujourd´hui je suis passée par l´Aldeia Maracanã
pour voir ce qu´il s´y passe. Lendroit est occupée
par la police, bien armée, avec les lumières rouges qui clignotent
et montrent sa présence insidieuse. Toute la zone est en travaux, elle
devenue un chantier pour le capital.
Mais, la lutte continue. Des processus de résistance et dinsubordination
peuvent arriver, à lintérieur des conditions post-modernes
de domination.
Cest dans ce but que je vous écris. Il faut crier la violence.
Ceux qui sont victimes de la ségrégation - ces différences,
un réservoir d´hétérogénèse - en
tant que différences réalisent leurs forces, résistent,
montrant qu´il est possible de ne pas être irrémédiablement
capturé dans les mailles du pouvoir.
Faisons tous, une critique en acte à ceux qui veulent faire taire les
différences.
Lucia